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L'existence d'un montage alternatif licite ne permet pas d’échapper à la qualification d’abus de droit

Le Conseil d'Etat apporte quelques précisions en matière d'abus de droit (Conseil d’Etat, 12 décembre 2023, n° 470038 & 470039).


En l’espèce, deux frères résidents fiscaux français avaient constitué une société holding luxembourgeoise en vue d’apporter à son capital l’intégralité des titres d’une société française qu’ils avaient reçus par succession de leur père. La holding a ensuite reçu des distributions de dividendes en provenance de la filiale dont les titres ont été apportés. Pour appréhender des liquidités, les frères associés ont enfin par deux fois réduit le capital de la holding.




L’ administration fiscale a engagé un contrôle contre l’un des frères. Elle estimait que la holding était dépourvue de substance économique réelle et que son interposition entre les frères associés et la filiale apportée présentait le caractère d’un montage artificiel réalisé dans le but exclusif de permettre à ces derniers de s’approprier, en franchise d’impôt, le produit de cession des actifs de la filiale, par l’intermédiaire de la holding. En application de la procédure d’abus de droit prévue à l’article L. 64 du LPF, l’Administration estimait donc que les dividendes versés par la filiale devaient être considérés comme perçus directement par les associés.

 

Les deux frères contestaient cette interprétation sur le fondement qu’ils auraient pu mettre en place un autre montage, considéré comme licite, et qui aurait abouti au même résultat.

 

Dans sa décision du 12 décembre 2023, le Conseil d’Etat donne raison à l’Administration et rappelle que l’article L. 64 du LPF permet à l’Administration d’écarter, des actes n’ayant pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que le contribuable aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

 

A ce titre, le Conseil d’Etat considère, par une jurisprudence constante, qu’un acte n’étant à l’origine d’aucun gain fiscal pour le contribuable ne peut pas être écarté par l’Administration en application de l’article L. 64 du LPF.

 

Cependant, cette situation est, selon le Conseil d’Etat, distincte de l’hypothèse où le contribuable qui a passé ou réalisé un acte frauduleux dans le seul but d’atténuer sa charge fiscale aurait pu réduire cette charge de manière identique en opérant d’autres choix fiscaux licites. Une telle circonstance ne fait pas obstacle à ce que l’acte soit écarté car considéré comme abusif.

 

En conclusion, c’est bien la perception d’un gain fiscal illicite que la procédure d’abus de droit entend sanctionner. A partir du moment où ce résultat est atteint, le contribuable ne peut donc plus, en théorie, échapper à l’application de cette procédure en se prévalant notamment de l'existence d'un montage alternatif licite.





Me Matthieu GIORDANO, avocat

M. Hugo RABOURDIN, juriste


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